Exposition
Le Fleuve, Jean-Michel Alberola
Au fil des semaines, le peintre et cinéaste, dont l’oeuvre est nourrie d’érudition littéraire, a découvert les réserves de l’Institut où sont conservés des millions de documents qui composent la collection de l’Imec.
L’artiste Jean-Michel Alberola est entré dans les archives, inventaires en main, comme un héros stevensonien ne lâchant ni la carte de l’île au trésor ni la lampe sourde. Pendant des mois, ce grand lecteur a soigneusement exploré les réserves et il a dit : Kafka. Kafka, un absolu littéraire auquel toute la pensée du XXe siècle s’est confrontée. Kafka, inépuisable objet de nos lectures. Kafka, partout dans les collections de l’Imec — nous l’avons découvert sur les pas de Jean-Michel Alberola. Entre Vialatte et Lacassin, entre Guattari et Kofman, entre Bollème et Mosès, entre La NRF et les romans d’aventure, ce sont plus de 600 documents identifiés par l’artiste au cours d’une fougueuse recherche.
Mais il ne s’arrête pas là. Dans les souterrains, Alberola a habité Kafka comme un mollusque sa coquille. Il est devenu indien, insecte, cheval, pont, chinois, fleuve. Il a bâti des bibliothèques, composé des albums. De documents en documents, on découvre un portrait de l’Imec dont le filigrane est celui de l’artiste en chercheur — minutieux, rêveur.
« Depuis l’enfance, je suis dans les livres, les papiers, les notes autour d’une pensée, c’est paradoxalement par là que me vient une étrange confiance dans l’avenir de l’humanité. Ne sachant véritablement jamais quoi peindre, je me suis toujours servi de ce que je lisais pour avoir le début d’une idée de tableau.
Ce que nous connaissons forme la partie visible. Nous ne savons pas, ou nous oublions qu’un autre territoire existe. Puis on descend dans les réserves, on explore les souterrains peuplés de livres, à l’infini, une étendue silencieuse. L’ensemble des livres formant alors une surface habitée, une maison. Il y a la certitude de la présence en ces murs du nom de Kafka — tout était en place miraculeusement. Le fleuve s’écoule librement. Je remonte le temps ! »
Suivez le cours du fleuve en compagnie de…
Guattari, Cieslewicz, Albiach, Welles, Freund, Brod, Kantor, Stevenson, Duby, Clastres, Althusser, Gabel, Vialatte, Benjamin, Kropotkine, Sartre, Groethuysen, Gorz, Mosès, Robbe-Grillet, Paulhan, Collobert, Meschonnic, Duras, Adamov, Guerne, Kofman, Lagarce, Ruiz, Virilio, Mounier, Derrida, Brecht, Canetti, Schuster…
Jean-Michel Alberola,
commissaire de l’exposition
Né en 1953 à Saïda en Algérie, Jean-Michel Alberola vit et travaille à Paris. Depuis trente ans, il produit une oeuvre protéiforme entre figuration, abstraction et art conceptuel. Gouaches, néons, sculptures, livres d’artistes ou films sont les différentes facettes d’un travail qui interroge la fragilité de la beauté, l’ambiguïté du regard, le rôle de l’artiste et les fins de l’art. Avec humour et poésie, l’artiste engagé ne cesse de parler de peinture, de littérature et de politique.
En même temps que Le Fleuve à l’abbaye d’Ardenne, Jean-Michel Alberola expose à la galerie Templon, « Le roi de rien, la reine d’Angleterre et les autres » du 20 mai au 17 juillet 2021, 30 rue Beaubourg, 75003 Paris.
Imec, abbaye d’Ardenne
du 4 juin 2021 au 26 septembre 2021
Du mercredi au dimanche, de 14h à 18h
Visite guidée le samedi et le dimanche à 16h
Fermée le 14 juillet et le 15 août
Entrée libre et gratuite
Image. Arthur Adamov. Manuscrit de L’Homme et l’enfant (Gallimard, 1968), 1967 [détail]. Archives Arthur Adamov/Imec.