Fred Deux et Cécile Reims

Fred Deux, écrivain et dessinateur, et Cécile Reims, artiste graveur, vivent ensemble depuis 1951. Née en 1927 dans un village de Lituanie, Cécile Reims connaît une enfance rythmée par le judaïsme traditionnel. Orpheline de mère, elle arrive en France en 1933 avec son père. Tous les deux survivront à l’occupation allemande, mais leurs proches restés en Lituanie seront tous anéantis par les nazis et leurs alliés locaux. Engagée dans l’armée clandestine juive, Cécile Reims gagne après la guerre la Palestine et revient en France quelques années plus tard, gravement malade. En 1950, elle fréquente l’académie de la Grande Chaumière et, par hasard, fait la connaissance de Joseph Hecht. Celui-ci l’initie à la gravure sur cuivre. La rigueur du maître et l’exigence de l’outil – le burin – aident Cécile Reims à surmonter une période incertaine de son existence. Avec Fred Deux, rencontré l’année suivante, commence une vie centrée sur l’art marquée par de grandes difficultés matérielles, mais qui lui permet d’échapper définitivement au sentiment de désorientation dominant depuis son départ de Jérusalem.

Né à Billancourt en 1924 dans une famille ouvrière, Fred Deux est placé comme apprenti dans une usine au début des années 1940. Il aime dessiner, notamment sur les « bleus », ces schémas industriels que rapporte son père de l’atelier. En 1943, il est embauché comme électricien d’entretien de nuit. Il entre alors dans le groupe local de résistance des FTP. Engagé peu après dans les Goums marocains, il participe aux campagnes des Vosges, d’Alsace et d’Allemagne. À Marseille en 1947, il travaille dans une librairie, découvre la littérature et l’art et surtout le surréalisme. La suite, pour Fred Deux, est celle d’une formidable projection de soi par le dessin et par l’écriture autobiographique. Depuis La Gana, publié par Maurice Nadeau chez Julliard en 1958 et réédité en 1999 chez André Dimanche, il a fait paraître sous diverses enseignes une quinzaine d’ouvrages et plusieurs dizaines de recueils de dessins originaux.

L’œuvre de Cécile Reims, au burin et à la pointe sèche, a cheminé entre une gravure personnelle, faite de visions d’un anthropomorphisme analogique de plus en plus élaborées, et la gravure d’interprétation d’abord consacrée aux dessins de Hans Bellmer puis à ceux de Léonor Fini et à ceux de Fred Deux. Cécile Reims est également auteur d’une œuvre autobiographique en plusieurs volumes dont L’Épure, publiée par Maurice Nadeau (Julliard, 1963 ; réédition André Dimanche, 2000).

Le fonds Fred Deux rassemble plus d’une trentaine de manuscrits publiés ou inédits, ainsi qu’une centaine d’audiocassettes dans lesquelles il se raconte. Dans les archives de Cécile Reims, on trouve des carnets, des photographies et des dossiers concernant son œuvre gravée et ses textes autobiographiques. Cet ensemble sera complété ultérieurement par un choix d’œuvres dessinées ou gravées. Les deux fonds ont en commun une abondante correspondance témoignant du réseau complexe d’amitiés et d’affinités au sein duquel ont évolué Fred Deux et Cécile Reims. Ces deux apports sont complétés par un troisième provenant de Catherine Wehrlin qui a confié à l’IMEC l’ensemble des lettres que son mari François Wehrlin, ancien directeur de l’Architecture au ministère de la Culture, et elle-même ont reçu des deux artistes. Signalons par ailleurs une donation et un dépôt d’œuvres réalisés par Fred Deux et Cécile Reims au profit du musée de l’Hospice- Saint-Roch à Issoudun, proche de La Châtre où ils sont installés depuis plusieurs années.

Yves Chevrefils Desbiolles
La Lettre de l’IMEC, n°10, automne 2009, p. 16.

Les archives de Cécile Reims et Fred Deux.