C’était sur une haute colline dans les Himalayas, au Bhoutan, non loin de la frontière du Tibet. Nous étions une délégation officielle partie à la recherche de musiciens hauboïstes et de lamas sauteurs pour le Festival d’Automne, dirigé à l’époque par notre cher Michel Guy (mon frère et moi, nous avons eu des relations quasi filiales avec lui). Il fallait grimper pour atteindre le temple qui n’était pas un dzong, forteresse imposante comprenant un monastère et un gouvernement civil, mais qui comprenait nos sauteurs et nos hauboïstes.
Irrémédiablement gauchère, je me suis trompée de sens en arrivant au temple et encore aujourd’hui, impossible de savoir s’il faut tourner dans le sens des aiguilles d’une montre ou dans le sens inverse – spontanément, je me trompe toujours. « Tsss, dirent les moines. Pas bien, ça. Vous allez déclencher une catastrophe ».
Ce dessin a été fait la veille de la catastrophe, dans l’intérieur du temple, où se déroulait, au premier étage, cette cérémonie. Nous avions trouvé nos musiciens et nos danseurs, mais il fallait se tenir tranquille pendant que résonnaient les grands tambours. Les belles cérémonies du tantrisme tibétain sont énigmatiques, longues et lentes.
L’officiant en jaune qui dirige le culte était un moine venu d’Asnières.
La catastrophe eut lieu le lendemain ; un glissement de terrain coupa toutes les routes jusqu’à la capitale. Huit jours à l’écart du monde.