Poète, journaliste, grande voyageuse, militante contre l’oppression politique, Danielle Collobert retranscrit dans ses écrits cet « afflux de sensations différentes » qui l’amène à se révolter, à aller vers l’autre, l’ailleurs, à rompre avec la norme qui devrait être la sienne. Écrire pour garder une trace de soi avant de disparaître, pour tenter de retrouver son centre, son intégrité, ou pour rendre compte de son combat intérieur… Elle voulait voir le monde, l’appréhender tout entier, se l’approprier et agir sur lui, malgré la douleur ressentie, son corps « arraché, disloqué par le moindre accident qui [l]’effleure, la moindre rugosité ». Son écriture s’exonère des constructions grammaticales, syntaxiques, pour ne conserver que l’essentiel, dans un sentiment d’urgence. Cette « coulée des mots – à travers la peau », tente d’inscrire sur la feuille de papier le souffle de l’auteure, la totalité de son être.
Peu connue, l’œuvre de Danielle Collobert (1940-1978) est hantée par « le malaise biologique de vivre, c’est-à-dire de penser ». Après un premier recueil dont elle détruira le tirage, Meurtre paraît en 1964 chez Gallimard, suivi de Dire I et II puis Il donc aux éditions Seghers-Laffont, et d’un dernier recueil, Survie, publié par Orange Export Ltd. La trajectoire singulière de Danielle Collobert se conclue tragiquement par son suicide, le 24 juillet 1978, jour de son trente-huitième anniversaire. Ses œuvres complètes, riches de nombreux inédits, ont été publiées en 2005 aux éditions P.O.L.